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Toxines fongiques dans le blé: des systèmes de cultures innovants réduisent des mycotoxines de Fusarium

Les toxines fongiques dans le blé constituent un danger pour la santé humaine et animale. Agroscope a étudié trois systèmes de culture sans labour afin d’améliorer la qualité et le rendement de la récolte de blé à l’aide de stratégies alternatives de protection des plantes.

La fusariose de l’épi est une maladie fongique dévastatrice du blé responsable de pertes de récoltes et de la contamination des grains par des mycotoxines telles que le déoxynivalénol (DON) et la zéaralénone (ZEN), dangereuses pour la santé de l’homme et de l’animal. En Suisse, la fusariose de l’épi est principalement causée par l’espèce de champignon Fusarium graminearum.

Rotation, labour et produits phytosanitaires contre l’infection fongique

Une rotation appropriée avec des cultures qui ne servent pas d’hôte au champignon et l’enfouissement approfondi des résidus de culture sont des pratiques agricoles efficaces pour réduire le risque d’attaque par le Fusarium. Cependant, le travail du sol réduit améliore la qualité du sol. Cette pratique est encouragée par des paiements directs dans plusieurs cantons. Outre la rotation et le travail du sol appropriés, il existe d’autres mesures pour réduire l’infection des cultures par le Fusarium telles que la mise en place de variétés moins sensibles et l’utilisation de produits phytosanitaires de synthèse. Cependant, l’efficacité des fongicides est souvent insuffisante en raison de la courte période pendant laquelle les applications sont possibles ainsi que du développement de souches fongiques résistantes. En outre, la tendance actuelle est à éviter les produits phytosanitaires de synthèse. Il faut donc chercher de nouvelles stratégies pour lutter contre l’infection par le Fusarium et la contamination des produits de récolte par des mycotoxines.

Étude de trois systèmes de culture visant à réduire les mycotoxines de Fusarium

Dans le cadre d’une rotation maïs-blé sans labour, Agroscope a étudié trois stratégies innovantes visant à lutter contre la fusariose de l’épi et à réduire les mycotoxines dans le blé.

Biofumigation «cut-and-carry»: La biofumigation est la désinfection du sol par des substances produites lors de la décomposition des glucosinolates après que les plants de moutarde mis en place comme couvert végétal ont été enfouis dans le sol. L’engrais vert « cut-and-carry » est une stratégie de fertilisation dans laquelle les cultures fixant l’azote, par exemple les légumineuses ou les mélanges trèfles-graminées, sont hachées et utilisées pour fertiliser la culture proprement dite sur une autre parcelle. Cette technique permet non seulement de fertiliser le sol, mais aussi d’endiguer certaines maladies lorsque l’infection est transmise par le sol ou par des résidus de culture infectés. La biofumigation « cut-and-carry » avec de la moutarde pourrait inhiber le champignon Fusarium qui hiberne dans les résidus de culture et ainsi réduire le développement de la fusariose de l’épi dans la culture céréalière suivante.

Sous-semis en culture de maïs: Les sous-semis fixent les nutriments, améliorent la structure, forment de l’humus, protègent de l’érosion, ne laissent pas de place aux adventices et augmentent la biodiversité souterraine et à la surface du champ. En outre, le rendement total de la rotation peut ainsi être augmenté. Dans les parcelles test, cinq essais de culture de maïs ont été mis en place avec sous-semis de trèfle rouge, d’herbe du Soudan, de phacélie, de moutarde blanche et de moutarde brune, par rapport au maïs seul (sans sous-semis).

Couverts végétaux: Agroscope a testé cinq méthodes: herbicide sans couvert végétal, labour sans couvert végétal, ainsi que de la moutarde blanche, de la moutarde brune ou des pois fourragers d’automne comme couverts végétaux.

Principaux résultats

Biofumigation « cut-and-carry »: Par rapport au procédé témoin avec des résidus de culture infectés, la méthode de culture avec des couches de mulch à base de moutarde blanche, de moutarde brune et de trèfle d’Alexandrie a réduit la teneur en DON et en ZEN dans les grains de blé de respectivement 37−58 % et 65−87 %. Le rendement a été augmenté jusqu’à 15 %.

Sous-semis en culture de maïs: Par rapport au témoin sans sous-semis, les systèmes de sous-semis maïs-moutarde blanche et maïs-moutarde brune ont réduit la teneur en DON de la culture suivante de blé d’hiver respectivement de 58 et 32 %. De même, les systèmes maïs-phacélie et maïs-moutarde blanche ont réduit la teneur en ZEN respectivement de 34 et 47 %. Cependant, la forte réduction des mycotoxines n’a été observée que lorsque la pression d’infection était modérée (année 2017), mais pas lorsque la pression d’infection était élevée (année 2019).Les sous-semis n’ont pas eu d’impact négatif sur le rendement du maïs.

Couverts végétaux: Grâce à la culture des couverts végétaux (moutarde blanche, moutarde brune ou pois fourragers d’automne) entre les cultures d’une rotation maïs-ensilage – blé de printemps, la teneur en DON dans le blé a été réduite jusqu’à 74 %. En outre, tous les couverts végétaux ont augmenté le rendement en grains du blé de printemps de 13 à 25 %.

Conclusions

  • Les systèmes de culture innovants étudiés comme stratégie alternative de protection des plantes dans les cultures sans labour sont avantageux pour les producteurs/productrices et les consommateurs/consommatrices de céréales, car ils réduisent le risque de mycotoxines de Fusarium dans le blé et améliorent également le rendement et la qualité de la récolte.
  • La mise en place de moutarde blanche et de moutarde brune pour la biofumigation « cut and carry », comme sous-semis en culture de maïs et comme couvert végétal pour la réduction des mycotoxines dans le blé est prometteuse, sachant que des résultats cohérents ont été obtenus en particulier grâce à la biofumigation.
  • L’utilisation du trèfle d’Alexandrie pour la biofumigation « cut-and-carry » ou comme engrais vert permet non seulement de réduire les mycotoxines, mais aussi d’améliorer la fertilité du sol.
  • Les coûts de production supplémentaires des systèmes agricoles innovants devraient être compensés par des mesures de politique agricole afin d’éviter d’éventuels conflits entre les objectifs de sécurité alimentaire et ceux liés à la rentabilité des exploitations agricoles.

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