Agroscope

De combien d’eau supplémentaire les cultures suisses auront-elles besoin à l’avenir?

Agroscope Science, 107, 2021, 1-55

Des simulations montrent comment le changement climatique affectera les besoins en eau de diverses cultures du Plateau. Ces calculs permettent de planifier à l’avance l’irrigation et l’adaptation des cultures au changement climatique.

Plus le changement climatique se fera sentir, plus il fera chaud et moins il y aura de précipitations en été. La production agricole doit donc s’attendre à un manque d’eau croissant. L’irrigation peut compenser ces déficits, à condition que les ressources en eau soient suffisantes.

Estimation des besoins en irrigation à partir de modèles

A l’aide de la méthode de la FAO pour estimer les besoins d’irrigation spécifiques aux cultures, nous avons pu modéliser les changements en termes de besoins d’irrigation auxquels il faut s’attendre à l’avenir à partir de projections climatiques actuelles. Les changements ont été étudiés pour différents sites du Plateau suisse (Aigle, Bâle, Berne, Changins, Güttingen, Payerne, Reckenholz) et pour diverses grandes cultures, cultures maraîchères et herbagères.

Davantage d’irrigation nécessaire surtout en été et en automne

Les projections sans mesures de protection du climat (profil d’évolution RCP8.5) montrent une augmentation de la demande en eau pour l’irrigation pour toutes les cultures et tous les sites. Pour les cultures étudiées (pomme de terre, laitue iceberg et ray-grass), le pourcentage d’augmentation estimé est d’environ 30 % à l’horizon 2045-2074 et d’environ 50 % à l’horizon 2070-2099.

En valeurs absolues, les besoins d’irrigation les plus importants sont prévus dans les sites qui sont déjà plus arides aujourd’hui, à savoir Aigle, Changins et Payerne. D’un point de vue saisonnier, la demande d’irrigation augmente le plus durant les mois d’été et d’automne, alors qu’on s’attend à peu de changement en moyenne au printemps.

Utilité pour la mise en place de mesures d’adaptation au climat

La méthode appliquée offre de nombreuses possibilités d’utilisation, par exemple dans le cadre de la planification de projets d’infrastructures d’irrigation ou pour le développement de mesures alternatives d’adaptation au climat, telles que la mise en place de variétés ou de cultures plus résistantes à la sécheresse. Une planification à long terme peut réduire les conflits futurs liés à l’utilisation de l’eau et éviter les mauvais investissements.

Intégration nécessaire des données de terrain et des phénomènes météorologiques extrêmes

Des études ultérieures devront se pencher plus en détail sur les incertitudes actuelles du modèle et les réduire progressivement en intégrant des données de terrain. Outre les changements des besoins moyens d’irrigation, les effets de la fréquence accrue des phénomènes météorologiques extrêmes doivent également être étudiés de plus près.

Conclusions

  • Sans mesures de protection du climat, les besoins en eau de l’agriculture suisse sur le Plateau augmenteront en général selon les estimations du modèle.
  • Pour les cultures étudiées, le pourcentage d’augmentation estimé à l’horizon 2045-2074 est d’environ 30 % et à l’horizon 2070-2099 d’environ 50 %.
  • L’augmentation des besoins en irrigation se fait particulièrement sentir pendant les mois d’été et d’automne.
  • La méthode opérationnelle de la FAO pour estimer les besoins d’irrigation spécifiques aux cultures offre un potentiel d’application dans la planification des mesures d’adaptation (p. ex. les projets d’infrastructure d’irrigation).
  • Les validations et les ajustements des modèles visent à réduire les incertitudes des projections.
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