Agroscope, Office de l’agriculture et de la nature du canton de Berne, Service spécialisé Sols, Centre for Development and Environment (CDE), Université de Berne

Un suivi sur plusieurs années aboutit à des mesures efficaces pour réduire l’érosion du sol

L’érosion du sol dans les grandes cultures peut être nettement réduite par des mesures adéquates, notamment par des méthodes de travail conservatoire. C’est ce que montre une étude de terrain menée sur plusieurs années par Agroscope, le service spécialisé Sols du canton de Berne et l’Université de Berne.

L’érosion du sol est l’une des principales menaces pesant sur la ressource sol en Suisse et dans le monde. Le changement structurel, avec l’augmentation de la taille moyenne des parcelles et l’utilisation de machines toujours plus grandes et plus lourdes pour le travail du sol, entraîne un risque accru d’érosion. On prévoit en lien avec le changement climatique une augmentation de la fréquence et de l’intensité des fortes pluies, qui peuvent provoquer des dégâts d’érosion sur les parcelles non protégées. L’augmentation des précipitations hivernales – surtout sous forme de pluie plutôt que de neige – peut occasionner une intensification de l’érosion en hiver.

24 ans de suivi de l’érosion dans la région de Frienisberg

Une étude de terrain sur l’érosion du sol dans les grandes cultures a été menée dans la région de Frienisberg (canton de Berne) sur 210 parcelles pendant 24 ans. L’approche transdisciplinaire et participative de cette étude se caractérise par une étroite et longue collaboration entre Agroscope, le service des sols du canton de Berne et l’Université de Berne. Au total, 130 cartographies des dégâts d’érosion couvrant l’ensemble de la surface ont été réalisées jusqu’à présent et près de 2500 dégâts d’érosion ont été relevés et documentés. De plus, de nombreux cours sur le terrain, d’excursions et d’ateliers ont été organisés avec des experts nationaux et internationaux issus de la pratique et de la recherche. Outre l’acquisition de connaissances scientifiques, le développement d’outils d’aide à la pratique et à l’exécution a été au premier plan des recherches.

L’érosion du sol est variable dans l’espace et dans le temps

Les pertes annuelles moyennes de sol présentent une grande variabilité dans le temps et dans l’espace. C’est pourquoi les mesures à long terme sont très importantes. En moyenne, 55 % des pertes ont eu lieu pendant le semestre d’hiver et 45 % pendant le semestre d’été. C’est pourquoi des mesures de réduction sont nécessaires aussi bien pour les cultures semées au printemps que pour celles semées à l’automne. Souvent, au sein d’une parcelle, seule une partie est touchée par l’érosion. Les dépressions de terrain, les chaintres et les lignes de ruissellement de surface (ornières, sillons en bordure de champ) sont fréquemment à l’origine de dégâts d’érosion sur une parcelle.

Les méthodes de travail conservatoire offrent la protection la plus efficace

Les méthodes de travail conservatoire du sol telles que le semis direct, le semis en bandes fraisées, le semis en bandes et le semis sous mulch sont les mesures de protection contre les pertes les plus efficaces et réduisent l’érosion du sol d’un facteur 10 en moyenne. La part de ces méthodes de travail était d’environ 7 % au cours des douze premières années de l’étude. Elle a pu être augmentée à 72 % au cours des douze années suivantes grâce à des programmes de promotion cantonaux et nationaux ainsi qu’à notre projet de recherche. Les pertes moyennes de sol par parcelle et par an ont diminué de 78 % durant la même période.

Pollution des eaux par l’érosion des sols

Les courts-circuits hydrauliques tels que les bouches d’égout et les plaques d’égout de maintenance, qui font actuellement l’objet de discussions en rapport avec les apports de produits phytosanitaires dans les cours d’eau, ont été cartographiés pour la première fois en 1997 sur l’ensemble du territoire et identifiés comme une source importante d’apport de sédiments, de phosphore et de produits phytosanitaires dans les cours d’eau. Environ 20 % des pertes de sol en moyenne ont atteint un cours d’eau dans la région de Frienisberg.

Outils pour l’application de la loi et pour la pratique

La carte du risque d’érosion et la carte des zones attenantes à des eaux de surface en Suisse (https://map.geo.admin.ch/) ont été développées et vérifiées dans la zone d’étude. Différentes fiches techniques et d’autres outils ont été élaborés pour l’application à l’échelle nationale des bases légales relatives à l’érosion du sol et pour des projets internationaux.

Conclusions

  • Des mesures de longue durée permettent d’appréhender la grande variabilité temporelle et spatiale de l’érosion du sol et de vérifier l’efficacité des mesures.
  • La protection contre l’érosion dans les conditions de la pratique est possible. Une utilisation adaptée au site (choix des cultures, rotation des cultures, méthodes de travail conservatoire du sol, enherbement des surfaces en hiver) a permis de réduire le risque moyen d’érosion de près de 80 %.
  • Les courts-circuits hydrauliques se sont révélés être d’importantes sources d’apport: 20 % des pertes de sol en moyenne sont parvenues dans les cours d’eau par ce biais.
  • L’étroite collaboration de tous les participants pendant toutes ces années et l’approche transdisciplinaire et participative de la recherche ont contribué de manière déterminante au développement de nombreux outils destinés à l’exécution et à la pratique.
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