Agroscope, ETH Zurich

Réduire efficacement les excédents d’azote

Une comparaison de différentes méthodes de fertilisation azotée du blé d’automne a montré que la fertilisation azotée variable et spécifique au site permettait de réduire considérablement les excédents d’azote.

Quelles approches permettent de réduire les excédents d’azote dans l’agriculture suisse? Cette question est d’actualité, car les pertes d’éléments nutritifs en azote et en phosphore doivent être réduites de 20 % d’ici à 2030. C’est l’objectif de la Trajectoire de réduction des éléments nutritifs, décidée par le Conseil fédéral en avril 2022.

Fertilisation adaptée aux besoins à l’aide de capteurs

En collaboration avec l’ETH Zurich, des chercheuses et chercheurs d’Agroscope ont développé, à l’exemple de la culture du blé d’automne, une méthode basée sur des capteurs qui permet une fertilisation variable et adaptée aux besoins d’une culture. Cette solution technique a été comparée à une fertilisation standard.

L’évaluation a porté d’une part sur la réduction des excédents d’azote et l’effet sur les rendements et, d’autre part, sur la rentabilité des deux solutions. Les données utilisées pour l’évaluation provenaient de sept essais d’une culture de blé d’automne en plein champ réalisés sur trois ans (2018-2020) à la Swiss Future Farm dans la région de Tänikon (TG).

La fertilisation variable a réduit l’excédent d’azote d’un tiers

L’évaluation a montré que la fertilisation variable à l’aide de capteurs nécessitait en moyenne 13 % d’engrais azoté en moins que la fertilisation standard et réduisait l’excédent d’azote de 32 %, sans affecter le rendement dans cinq champs sur sept. Les coûts des engrais azotés étaient en moyenne plus faibles dans le cas de la fertilisation variable que dans celui de la fertilisation standard sur l’ensemble des champs. La fertilisation variable nécessiterait toutefois des investissements supplémentaires, par exemple pour l’achat de capteurs ou l’évaluation des données satellites.

Une augmentation du prix des engrais pourrait-elle avoir le même effet?

Une autre possibilité serait d’augmenter le prix des engrais azotés afin de faire coïncider l’optimum économique avec un «optimum écologique». Un excédent d’azote de 30 kg par ha a été considéré comme un «optimum écologique». Le calcul de la taxe se base sur un prix du blé de 52 ct par kg et un prix des engrais de 42 ct par kg (selon le type et la teneur en azote des engrais).

Dans le cas de cette solution, il a été démontré qu’il faudrait une augmentation de prix allant jusqu’à 5,4 fois le prix des engrais de 2019 pour que l’excédent d’azote soit réduit à un niveau acceptable pour l’environnement. Même si les prix des engrais ont augmenté de plus de la moitié ces dernières années, une taxe de cette ampleur ne semble guère réaliste sur le plan politique.

Des solutions techniques prometteuses

L’étude montre que les solutions possibles pour réduire les excédents d’azote peuvent être évaluées à l’aide de données techniques de production ainsi que de données économiques et environnementales. Les solutions techniques, comme la fertilisation variable, ont le potentiel de réduire l’utilisation d’engrais azotés sans nuire aux rendements en nature et financiers.

Il s’est toutefois avéré que les besoins en azote variaient davantage d’une année à l’autre qu’entre les différents champs de la même année, ce qui rend difficile l’estimation précise de l’utilisation écologiquement optimale d’engrais au niveau des champs. Pour cela, des progrès sont nécessaires dans de nombreux domaines, notamment dans la compréhension de la fertilisation adaptée au site, du potentiel de minéralisation de l’azote et des variations saisonnières. De plus, il est indispensable de disposer de capteurs et de modèles plus performants ainsi que d’ensembles de données plus importants provenant de différents champs et sites.

Des investissements importants sont nécessaires

Par ailleurs, le potentiel économique varie en fonction de la taille de l’exploitation et, souvent, les investissements dans des technologies coûteuses ne sont pas rentables pour les petites et moyennes exploitations. Dans ces conditions, l’utilisation commune de machines ou le recours à des prestations d’entreprises de travaux agricoles pourraient être plus avantageux que l’achat.

Une autre possibilité serait de soutenir financièrement de telles technologies. Un soutien de ce type pourrait notamment être financé par les recettes d’une taxe sur les engrais minéraux.

Conclusions

  • La combinaison d’une évaluation économique et écologique de la fertilisation azotée met en évidence des solutions possibles pour réduire les excédents d’azote.
  • La solution technique étudiée, à savoir la fertilisation azotée variable à l’aide de capteurs, a réduit l’excédent d’azote d’un tiers sans affecter les rendements dans cinq champs sur sept.
  • Dans le cas de la solution axée sur le marché, il faudrait une augmentation de prix allant jusqu’à 5,4 fois le prix des engrais de 2019 pour réduire l’excédent d’azote à un niveau acceptable pour l’environnement. L’application d’un tel prix n’est pas réaliste du point de vue politique.
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