Agroscope, ETH Zurich, Université de Zurich

La télédétection permet d’estimer les rendements à l’intérieur des champs de céréales

Les données satellites permettent d’estimer le rendement des récoltes aussi bien à grande échelle qu’au niveau des parcelles. Autrement dit, cette méthode peut également convenir pour l’agriculture suisse pratiquée sur de petites surfaces, comme le montre une équipe de chercheurs de l’EPFZ, de l’Université de Zurich et d’Agroscope.

A l’aide de données satellites, il est possible de mesurer le développement des plantes dans les champs. Cette méthode a déjà été utilisée pour estimer des rendements de récolte à grande échelle, par exemple sur l’ensemble des États-Unis et dans des régions entières d’Australie. Ce sont les données des satellites Landsat de la NASA qui ont été utilisées à cet effet.

Les satellites européens fournissent une meilleure résolution spatiale

Cette méthode pourrait-elle être appliquée dans des régions où l’agriculture est pratiquée sur des parcelles relativement petites, comme c’est le cas en Suisse? C’est sur cette question et sur d’autres qu’a porté le projet DeepField auquel des chercheuses et des chercheurs de l’EPFZ, de l’Université de Zurich et d’Agroscope ont collaboré. Financé par l’Office fédéral de l’agriculture, ce projet utilise les données des satellites Sentinel 2 de l’Agence spatiale européenne (ESA) qui sont en libre accès. Ces satellites ont une résolution spatiale allant jusqu’à 10 m et une fréquence de survol de trois à cinq jours, ces deux paramètres sont donc plus élevés que ceux des satellites Landsat.

Les instruments de mesure des satellites Sentinel 2 ont été optimisés pour le suivi de la végétation et permettent d’enregistrer la lumière réfléchie par les plantes dans une signature spectrale. Cette signature permet de tirer des conclusions sur les caractéristiques des plantes, telles que la biomasse ou la teneur en chlorophylle, qui peuvent également refléter la teneur en azote des plantes.

Dans une étude récemment publiée, les chercheuses et chercheurs montrent que la modélisation des rendements de récolte à l’intérieur des champs de céréales est possible avec une résolution de 10 m sur les petites surfaces agricoles typiques de la Suisse. La méthode a été testée sur une exploitation de Witzwil (BE), relativement grande pour la Suisse, où la carte des rendements d’une moissonneuse-batteuse moderne a pu être utilisée comme données d’entraînement pour le modèle.

Traitement des données facilité grâce à l’intelligence artificielle

L’équipe de recherche a comparé quatre méthodes de modélisation: trois méthodes relativement courantes et une approche relativement nouvelle basée sur l’intelligence artificielle (IA), c’est-à-dire les réseaux neuronaux. Il s’est avéré que la méthode d’IA peut trier de manière autonome les points de données nuageux et non nuageux des images satellites, ce qui simplifie considérablement le prétraitement des données de mesure et le raccourcit.

Selon les auteurs, cette étude montre qu’il est possible de modéliser les rendements des cultures à l’aide des données satellites de l’ESA et des méthodes existantes ainsi que de l’IA. Afin d’utiliser cette méthode dans la pratique, il faudrait davantage de cartes des rendements et aussi davantage de cartes couvrant d’autres régions de Suisse, ce qui permettrait de calibrer et d’étayer les modèles à plus grande échelle.

Possibilités d’utilisation: prévisions des rendements, agriculture de précision, monitoring environnemental

La modélisation à petite échelle et la prévision des rendements des récoltes peuvent servir d’une part à évaluer de manière précoce la sécurité alimentaire de la Suisse et, d’autre part, à établir des cartes du potentiel de rendement aussi bien à l’échelle du pays que de l’exploitation. Les exploitations agricoles pourraient utiliser les résultats de la modélisation pour optimiser la fertilisation, la densité de semis ou d’autres stratégies de culture ainsi que pour identifier et réduire ultérieurement d’éventuelles atteintes à l’environnement.

Conclusions

  • A l’aide des données satellites en libre accès de l’Agence spatiale européenne, il pourrait être possible à l’avenir d’estimer les quantités de récolte dans les champs dans le contexte d’une agriculture pratiquée sur de petites surfaces comme c’est le cas en Suisse.
  • Les réseaux neuronaux sont adaptés à l’estimation des quantités de récolte, car ils fonctionnent aussi bien que les modèles existants; or, ils ont en plus l’avantage de pouvoir filtrer de manière autonome les données inutilisables, ce qui facilite le traitement des données.
  • Pour une utilisation à l’échelle nationale, la méthode doit d’abord être calibrée à plus grande échelle. A cet effet, il faut disposer de cartes de rendements sur plusieurs années et couvrant d’autres régions de Suisse.
  • Cette méthode convient pour le monitoring agro-environnemental et pour estimer la sécurité alimentaire ainsi que pour l’agriculture de précision dans la pratique agricole, par exemple comme base pour la fertilisation adaptée au site.
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