Inventaire des gaz à effet de serre 2023: les nouvelles bases de calcul ne changent guère le bilan global de l’agriculture
Photo: Daniel Bretscher,
Agroscope
Agroscope établit chaque année des inventaires et des prévisions actualisés des émissions de gaz à effet de serre d’origine agricole en Suisse. Avec le passage au reporting depuis l’Accord de Paris, de nouvelles bases de calcul doivent être prises en compte. Néanmoins, le bilan global de l’agriculture ne change guère.
L’agriculture et la filière alimentaire constituent une source importante d’émissions de gaz à effet de serre en Suisse. Selon la répartition sectorielle pour les inventaires nationaux, la part de l’agriculture était de 13,3 % en 2020. Au cours de la deuxième période d’engagement du Protocole de Kyoto (2013-2020), ces émissions étaient inférieures de plus de 10 % à celles de 1990. Pour atteindre les objectifs de la stratégie climatique à long terme de la Confédération, il est nécessaire de redoubler d’efforts. L’inventaire fournit des bases importantes pour y parvenir.
Nouvelles directives internationales de calcul
Cette année, la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques a initié un changement décisif dans le calcul des inventaires de gaz à effet de serre. Les anciennes directives du Protocole de Kyoto sont remplacées par les directives correspondantes de l’Accord de Paris. D’une part, les Directives générales pour l’établissement des comptes rendus ont été adaptées. Ces adaptations comprennent notamment le passage aux potentiels de réchauffement global (PRG) du cinquième Rapport d’évaluation sur l’état du climat, qui accordent une importance un peu plus grande au méthane et un peu moins grande au protoxyde d’azote qu’auparavant. D’autre part, les lignes directrices pour les inventaires nationaux de gaz à effet de serre de 2019 ont également été actualisées.
Adaptation des calculs aux conditions suisses
Grâce à une recherche continue sur les flux de matières et d’énergie agricoles, de nombreuses méthodes et facteurs de calcul ont pu être adaptés par le passé aux conditions spécifiques de la Suisse et au niveau des connaissances les plus récentes. Les modèles de calcul sont donc moins dépendants des méthodes et facteurs standard des directives internationales. C’est ce qui explique que les nouvelles directives pour le secteur agricole n’entraînent que des adaptations minimes dans l’inventaire suisse des gaz à effet de serre:
- Les émissions de protoxyde d’azote des animaux au pâturage sont nettement inférieures à celles calculées jusqu’à présent.
- Les émissions indirectes de protoxyde d’azote après le lessivage ou le ruissellement de l’azote sont plus élevées que celles calculées jusqu’à présent.
- Les taux de méthane pour les émissions liées à la digestion des bovins et des veaux ont été légèrement ajustés à la baisse.
- La digestibilité du fourrage de diverses catégories d’animaux a été estimée à un niveau plus élevé, ce qui fait que les émissions de méthane dues au stockage des engrais de ferme sont légèrement inférieures.
- En raison de valeurs de référence légèrement plus élevées pour les températures ambiantes, les calculs ont abouti à des émissions de méthane un peu plus élevées pour le stockage du lisier.
La baisse des émissions de protoxyde d’azote au pâturage a un impact limité sur les émissions totales
Parmi les nouveautés qui peuvent être importantes, les émissions de protoxyde d’azote nettement plus faibles au pâturage se démarquent. Jusqu’à présent, on partait du principe que le dépôt d’une grande quantité d’azote sur une petite surface lors de l’excrétion d’urine au pâturage entraînait des émissions très élevées de protoxyde d’azote. Or, des mesures récentes ont montré que les facteurs d’émission sont nettement plus faibles que les facteurs standard internationaux utilisés jusqu’à présent pour le calcul. Ces ajustements désamorcent donc le conflit d’objectifs entre les émissions d’ammoniac et de protoxyde d’azote au pâturage. Du fait de la part relativement faible que représentent les émissions au pâturage dans l’ensemble des émissions agricoles, leur impact est toutefois faible (fig. 1). En conclusion, il n’y a guère de nouvelles connaissances qui pourraient être intégrées dans les recommandations pour la pratique et la politique agricoles.
Fig. 1: Comparaison des émissions de gaz à effet de serre agricoles entre la méthode du compte rendu 2022 (ancienne méthode de calcul) et 2023 (nouvelle méthode de calcul); les émissions de l’année 2020 sont comparées ici à titre d’exemple, le nouveau calcul concernant toujours l’ensemble de la série temporelle qui remonte jusqu’à 1990. Adaptation des valeurs PRG: les potentiels de réchauffement global (PRG) du protoxyde d’azote (N2O) et du méthane (CH4) ont été actualisés en 2023.
Conclusions
- Malgré les nouvelles directives et méthodes-cadre pour le recensement des gaz à effet de serre, les changements ne sont que mineurs en ce qui concerne les émissions de gaz à effet de serre agricoles dans l’inventaire national.
- Les conclusions fondamentales et les recommandations d’action pour la pratique agricole et la politique agricole restent inchangées. L’inventaire national s’avère donc être une base de décision fiable pour l’élaboration et la vérification des stratégies et des objectifs de réduction.
- Les nouveaux potentiels de réchauffement global (PRG) accordent un plus de poids à l’impact du méthane et un peu moins à celui du protoxyde d’azote.
- Compte tenu des dernières connaissances scientifiques, les émissions de protoxyde d’azote au pâturage sont nettement plus faibles, ce qui atténue le conflit d’objectifs par rapport à l’ammoniac. L’impact sur les émissions totales reste néanmoins réduit.
Référence bibliographique
Inventaire des gaz à effet de serre 2023: les nouvelles bases de calcul ne changent guère le bilan global de l’agriculture