Comment évaluer le statut agroécologique des exploitations agricoles suisses?

Des chercheuses et chercheurs d’Agroscope ont testé pour la première fois en Suisse la méthode de la FAO pour l’évaluation agroécologique des exploitations agricoles. Ce test a permis de démontrer les avantages d’une évaluation globale, mais aussi les limites de l’outil.

L’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a mis au point, dans le cadre d’une approche participative avec les États membres, un outil permettant d’évaluer le statut agroécologique des exploitations agricoles à l’aide d’une méthode applicable et comparable partout dans le monde. L’outil, appelé TAPE (Tool for Agroecology Performance Evaluation), .vise à mesurer la performance des systèmes agroécologiques en prenant en compte les différentes dimensions de la durabilité. Il consiste principalement en un entretien réalisé sur l’exploitation dans le but de répondre à un questionnaire standard.

Une des premières applications dans un pays à haut revenu

Jusqu’à présent, la méthode TAPE a surtout été appliquée dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire. Des chercheuses et chercheurs d’Agroscope ont désormais testé l’application de TAPE en Suisse. Ils ont en outre développé un nouvel indice de biodiversité pour TAPE qui prend en compte non seulement la biodiversité planifiée, par exemple le nombre de variétés ou d’arbres plantés, mais aussi la biodiversité non planifiée comme les abeilles sauvages ou les orchidées. La biodiversité non planifiée n’a pas été relevée directement sur le terrain, mais elle a été évaluée indirectement à travers l’impact qu’ont pu avoir différentes mesures agricoles.

Enregistrement insuffisant des systèmes herbagers

Les entretiens ont été menés dans 21 exploitations réparties dans toute la Suisse de façon à couvrir différents systèmes de production. Il s’est avéré que les exploitations à dominante herbagère ne pouvaient pas être enregistrées de manière adéquate dans la version actuelle de TAPE, car de nombreuses questions sont conçues pour les systèmes de grandes cultures. En outre, l’effort requis pour le relevé des données dans les exploitations agricoles suisses a considérablement dépassé la fourchette cible de TAPE, étant donné que l’enregistrement des pesticides, des machines et des informations sur les produits végétaux et animaux était plus complexe que dans les systèmes de petites exploitations agricoles typiques des pays à faible revenu et à revenu intermédiaire.

Premiers résultats agroécologiques

Néanmoins, TAPE a permis de déduire les premiers résultats agroécologiques. Les exploitations étudiées ont obtenu de très bons résultats pour les éléments agroécologiques «Gouvernance responsable» et «valeurs sociales», tandis que d’autres éléments tels que «Efficience» ou «Recyclage» peuvent encore être améliorés. L’indice d’efficience tient compte, entre autres, de l’utilisation d’intrants externes tels que les engrais minéraux ou les pesticides. L’indice de recyclage, lui, prend en considération le recyclage de la biomasse et des éléments nutritifs, les économies d’eau, l’achat de semences et d’animaux et les énergies renouvelables.

Pour la plupart des éléments agroécologiques, aucune différence significative n’a été constatée entre les régions (plaine/colline/montagne), mais les exploitations biologiques certifiées ont obtenu des résultats nettement meilleurs que les exploitations non biologiques en matière d’agroécologie. Toutefois, avec seulement huit exploitations biologiques et treize exploitations conventionnelles, l’échantillon n’est pas représentatif de l’agriculture suisse.

Nouvel indice de biodiversité déjà intégré dans TAPE

L’extension de l’outil à la biodiversité non planifiée permet d’intégrer un aspect écologique important qui n’était pas pris en compte jusqu’à présent. Le nouvel indice de biodiversité se base sur la méthode européenne BioBio, au développement de laquelle Agroscope a également participé. Une comparaison avec la méthode SALCA-Biodiversité, beaucoup plus détaillée et chronophage, a montré que le nouvel indice mesurait de manière fiable la biodiversité non planifiée. Il a déjà été intégré dans l’outil TAPE par la FAO et est désormais en accès libre pour d’autres utilisatrices et utilisateurs.