Agroscope

Un appauvrissement de la vie dans le sol diminue l’utilisation efficiente des éléments nutritifs par les cultures et augmente leurs pertes dans l’environnement

Les pertes d’éléments nutritifs issues de la production agricole constituent un problème global. Un essai en lysimètres montre que les organismes du sol peuvent contribuer fortement à une utilisation efficiente des éléments nutritifs par les cultures et à la réduction de leurs pertes.

Lorsque les engrais azotés apportés en grandes cultures ne sont pas entièrement utilisés par les plantes, les composés azotés peuvent se retrouver dans les eaux ou sous forme de gaz dans l’atmosphère. Pourtant ces pertes sont évitables et le microbiome du sol pourrait y remédier. En effet, les sols abritent une grande partie de la biodiversité mondiale, et les organismes du sol effectuent une multitude de transformations des éléments nutritifs dans le sol. Ils jouent donc un rôle important dans l’approvisionnement des plantes ainsi que dans les cycles des éléments nutritifs en général. Jusqu’à présent, on ne savait guère comment les différentes communautés biologiques du sol influençaient l’efficacité nutritive des systèmes plante-sol.

Lors d’un essai réalisé avec des lysimètres, l’influence de deux communautés biologiques du sol différentes, qui se distinguent par leur complexité, a été étudiée sur la nutrition du maïs et sur les pertes en azote.

Enrichir la vie du sol

Dans le cadre de l’étude d’Agroscope, huit cylindres expérimentaux (lysimètres) ont été remplis d’organismes vivants de moins de 4 mm (4000 µm). Ils contenaient diverses bactéries et communautés fongiques ainsi que des champignons mycorhiziens. A titre de comparaison, huit autres cylindres expérimentaux ont été remplis d’organismes vivants de moins de 11 µm, afin de générer une vie du sol comparativement plus pauvre en espèces. Ceux-ci ne contenaient que des bactéries et des communautés de champignons très simplifiées. Un trou dans le fond des lysimètres a permis de collecter l’eau d’infiltration afin de quantifier les pertes d’éléments nutritifs par lessivage. Les pertes gazeuses sous forme de protoxyde d’azote (N2O) nuisible au climat ainsi que l’azote gazeux (N2) ont été relevés par des chambres de prélèvement d’échantillons à la surface du sol.

Une vie du sol pauvre en espèces entraîne une diminution de l’approvisionnement en éléments nutritifs des plantes et une perte de rendement

Dans les sols présentant une vie très simplifiée (diversité des espèces plus faible, principalement des microorganismes), les rendements étaient inférieurs de 13 %, l’absorption d’azote de 20 % et l’absorption de phosphore de 58 % à ceux des sols présentant une vie plus riche (diversité des espèces plus élevée, présence de champignons mycorhiziens).

Augmentation des pertes en éléments nutritifs avec des communautés pauvres en espèces

Dans les sols avec une vie simplifiée, on a observé une augmentation de 65 % du lessivage de l’azote et une augmentation de 124 % des pertes d’azote sous forme de protoxyde d’azote (N2O) et de 97 % sous forme de gaz N2. Des analyses métagénomiques de l’ADN des organismes du sol ont permis d’identifier quelques gènes codant des enzymes, qui ont pu expliquer les effets sur la croissance des plantes, leur nutrition ainsi que les pertes d’éléments nutritifs.

Conclusion

  • Les résultats montrent que les communautés biologiques du sol jouent un rôle déterminant dans les cycles des éléments nutritifs et qu’elles ont un grand potentiel pour augmenter l’efficience des éléments nutritifs dans les cultures et pour réduire les pertes d’azote dans l’environnement.
  • Une diminution de la biodiversité du sol ou la perte de certains groupes d’organismes, par exemple en raison d’une exploitation trop intensive, pourrait entraîner une perturbation des cycles des éléments nutritifs, ce qui entraîne une baisse de la productivité et accentue en même temps la pollution de l’eau et le changement climatique.
  • Les pratiques agricoles devraient être adaptées pour préserver et stimuler la vie du sol, afin d’obtenir des rendements stables, d’économiser les engrais et de protéger l’environnement.
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