L’ADN des chevaux Franches-Montagnes dévoile les caractéristiques de la race
Photo: Christelle Althaus
L’étude des données génotypiques d’une population de plus de 1000 chevaux montre que le Franches-Montagnes se distingue des autres races historiquement introduites par croisements. Elle montre aussi des pistes pour limiter la consanguinité.
Le Franches-Montagnes (FM) est une race établie en Suisse à la fin du 19e siècle par le croisement de juments locales avec deux étalons anglo-normands: Vaillant (1891) et Imprévu (1886). Le livre généalogique FM a été officiellement publié en 1921. Par la suite, l’introduction périodique de chevaux d’autres races a été autorisée pour répondre à la demande du marché, initialement avec des chevaux lourds pour les travaux agricoles, puis avec des étalons de race Shagya, Pur-Sang arabe, Nonius, Anglo-Normand, Selle français et Demi-sang suisse afin de sélectionner un type de cheval plus léger pour l’équitation de loisir et l’attelage. Certaines de ces introgressions ont conduit à la formation de nouvelles lignées d’étalons. Actuellement, il en existe 11: 6 considérées comme originales, et 5 qui sont issues d’étalons d’autres races européennes.
Afin de préserver les caractéristiques de la dernière race suisse, le studbook a été fermé en 1997, c’est-à-dire qu’un poulain issu d’un croisement après cette année butoir n’est pas considéré comme un cheval FM à part entière. Les chevaux FM nés avant 1950 sont considérés comme étant de race pure, même si leur pedigree inclut des ancêtres d’autres races. Actuellement, le nombre des chevaux de type «ancien» (aucun croisement depuis 1950) est en baisse, ce qui entraîne une augmentation de la consanguinité dans cette sous-population. Inversement, dans l’élevage, la préférence va actuellement aux chevaux FM avec un haut pourcentage de sang étranger, ce qui menace l’intégrité de la population de chevaux FM en tant que race indigène, tant d’un point de vue génétique que phénotypique.
Visualiser la structure de la population en détail grâce aux génotypes
Pour interpréter les liens de parenté et la consanguinité de la race FM de manière précise, des scientifiques ont génotypé plus de 1200 chevaux en utilisant la puce de génotypage Affymetrix Axiom™. Celle-ci permet de représenter la variabilité génétique du génome du cheval de manière abordable. Avec plus de 600 000 marqueurs (SNP, polymorphismes nucléotidiques simples), ce génotypage permet de caractériser le génome de chaque cheval et d’étudier la diversité génétique parmi les races de chevaux domestiques: les chevaux apparentés ont davantage de marqueurs communs que les chevaux aux origines différentes. En plus des liens de parenté, la consanguinité individuelle a également été étudiée via le génome.
L’étude a comparé les génotypes de 1268 chevaux: 522 FM dont 44 de type ancien, 514 Demi-Sang (dont Noé, un étalon utilisé pour un des derniers croisements en 1990), 136 Pur-Sang arabes, 32 Shagya et 64 chevaux Pur-Sang anglais (des Demi-Sang utilisés pour l’apport de sang avec les FM montraient cette origine dans leur pedigree). En ce qui concerne les FM, les 11 lignées d’étalons étaient représentées par 8 à 148 descendants.
Pour évaluer la diversité génétique de la race FM et des FM types ancien en comparaison avec les autres races, les chercheuses et chercheurs ont utilisé une méthode prenant en considération le lien de parenté, le pourcentage de sang étranger et la consanguinité.
Le FM se distingue clairement des autres races
Les analyses montrent clairement que les FM et FM type ancien se distinguent des deux races arabes, ainsi que des Demi-Sang et Pur-Sang anglais. Le FM se distingue ainsi clairement des autres races historiquement introduites depuis 1950.
Cependant, on observe également des sous-structures de la population FM, dues en partie aux origines génétiques divergentes (type ancien). Malheureusement, on constate également une distorsion de la structure due à une surreprésentation de la progéniture de certains étalons influents.
Au sein de la race FM, les chevaux ayant un plus haut taux de sang étranger expliquent la majeure partie de la variance génétique de la population d’élevage actuelle et ont donc une plus grande influence sur celle-ci, tandis que les chevaux de type ancien ne représentent qu’une petite partie de la variance. Enfin, les analyses mettent en évidence que les chevaux FM présentent des niveaux élevés et inattendus de sang anglais.
Les chevaux FM étaient en moyenne moins consanguins que les autres races à studbook fermé (excepté les Demi-Sang) grâce notamment aux apports de sang, mais certaines données suggèrent une perte de diversité dans les deux sous-populations FM. Pour prévenir la consanguinité, les auteurs suggèrent d’intégrer les chevaux FM de type ancien dans la population d’élevage FM et d’encourager les éleveurs à ne pas cibler les couleurs de robes «rares» chez le FM telles que le noir et le gris.
Conclusions
- Le Franches-Montagnes (FM) est une race établie en Suisse à la fin du 19e siècle qui a connu des apports de sang périodiques de chevaux d’autres races, notamment Shagya, Pur-Sang arabe, Nonius, Anglo-Normand, Selle français et Demi-sang suisse.
- Une étude basée sur les données génotypiques de 1268 chevaux de race FM, Demi-Sang, Pur-Sang arabe, Shagya et Pur-Sang anglais montre que le FM est génétiquement la seule race d’origine suisse.
- Elle montre aussi que les chevaux FM sont en moyenne moins consanguins que beaucoup d’autres races européennes, mais certaines données suggèrent une perte de diversité due à la popularité de certains étalons.
- Pour prévenir la consanguinité, les auteurs suggèrent d’intégrer les chevaux FM de type ancien dans la population d’élevage FM et d’encourager les éleveurs à cibler des caractéristiques autres que les couleurs de robe.
Référence bibliographique
Using high-density SNP data to unravel the origin of the Franches-Montagnes horse breed.