Agroscope, ETH Zurich

Pas de fossé ville-campagne manifeste sur la priorisation des objectifs de politique agricole

Une récente étude d’Agroscope et de l’EPFZ montre qu’il n’y a pas de fossé ville-campagne sur les questions relatives à la priorisation des objectifs de politique agricole. Qu’elle soit très rurale ou très urbaine, la population suisse place les objectifs économiques avant les objectifs environnementaux.

On observe dans différents domaines un fossé entre les positions politiques des populations urbaines et rurales. Mais existe-t-il également un fossé entre ville et campagne s’agissant des préférences en matière de politique agricole? Si oui, cela pourrait conduire à ce qu’une majorité urbaine (dont les moyens d’existence ne dépendent pas de l’agriculture) impose ses valeurs et les mesures politiques qui en découlent à une minorité rurale.

Un sondage représentatif pour aller au fond des choses

Pour répondre à cette question, Agroscope et l’EPF de Zurich ont analysé les préférences en matière de politique agricole de 1542 personnes de trois régions linguistiques de Suisse (germanophone, francophone, italophone) vivant, selon leur propre appréciation, en zone très rurale à très urbaine. La priorité accordée à un objectif par les personnes interrogées était particulièrement intéressante lorsque celui-ci était directement mis en balance avec un autre objectif. Neuf paires d’objectifs (voir graphique) ont ainsi été soumises aux personnes sondées.

En haut: les six objectifs de politique agricole examinés (deux objectifs économiques et quatre objectifs environnementaux) soumis lors du sondage sous forme de neuf paires d’objectifs conflictuels (chaque objectif économique vs un objectif environnemental, plus les deux objectifs économiques opposés l’un à l’autre). En bas: confrontation des deux objectifs économiques, comme exemple de priorisation des objectifs.

Tendance à prioriser les objectifs économiques aux dépens des objectifs environnementaux

Quel que soit le lieu de résidence des personnes interrogées, la baisse de prix des denrées alimentaires et l’augmentation des revenus agricoles sont priorisées aux dépens de la réduction des émissions de gaz à effet de serre ou de la réduction de l’utilisation de produits phytosanitaires. En revanche, pour la plupart des sondés, la réduction des excédents d’éléments nutritifs passe avant l’un des objectifs économiques. Lorsque l’un des objectifs économiques est mis en balance avec l’amélioration de la biodiversité, il ne se dégage pas de préférence claire pour l’un ou l’autre des objectifs. En moyenne, sur l’ensemble des personnes interrogées, les préférences pour l’un ou l’autre des objectifs de politique agricole ne sont pas particulièrement marquées.

Peu de différences entre les régions rurales et urbaines

Les préférences en matière de politique agricole ne diffèrent guère selon le lieu de résidence. Des différences significatives n’apparaissent que dans quelques rares cas, notamment chez les personnes vivant dans des régions très rurales. Celles-ci estiment l’amélioration de la biodiversité et la réduction de l’utilisation de produits phytosanitaires nettement plus importantes que les personnes interrogées dans d’autres régions. Les personnes vivant dans des zones très rurales accordent également plus d’importance à une baisse des prix des denrées alimentaires qu’à une augmentation des revenus agricoles lorsque ces deux objectifs sont mis en balance.

Conclusion

  • Il n’existe pas de fossé ville-campagne dans les préférences de la population suisse en matière de politique agricole.
  • Les objectifs économiques de politique agricole sont tendanciellement préférés aux objectifs environnementaux, et ce indépendamment du lieu de résidence.
  • Les personnes vivant dans des régions très rurales constituent une exception, car elles sont plus nombreuses que les habitants des régions moins rurales à considérer l’amélioration de la biodiversité, la réduction des produits phytosanitaires et la baisse de prix des denrées alimentaires comme plus importantes.
  • Sur la base de ces résultats, la politique devrait s’attacher à réduire les conflits d’intérêts entre objectifs économiques et environnementaux.
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